Agriculture syntropique. Le jardin en syntropie de Marieke

C’est en Corrèze vers Branceilles que je suis allée à la rencontre de Marieke qui a fait le pari de tenter un jardin syntropique sur son terrain de plusieurs hectares et avec une terre d’une épaisseur de seulement 10 centimètres. Et je vous assure qu’avec la canicule qui est passée par là, ses plantes avaient fière allure !

Des artichauts, des amarantes et des tournesols bien fleuris !

Un jardin à l’image de Marieke, curieuse de tout, avide d’apprendre, expérimentant plein de techniques. Résultat : des plantes à tous les étages, une abondance, une profusion et une luxuriance sans égal.

C’est quoi la syntropie déjà ? Vous avez un trou de mémoire ? La réponse dans cet article :

Marieke, une vie vers l’autonomie par la syntropie ?

Quelle est donc cette personne qui n’a pas peur de se lancer dans une autre manière de jardiner ? Quel est son parcours ? Comment en est-elle venue à ce type de jardinage ?

En tout, Marieke a eu deux jardins, avec leurs problématiques propres et, c’est en s’y adaptant, qu’elle est passée du maraîchage permaculturel à la culture syntropique.

Du maraîchage…

En discutant avec Marieke, qui jardine depuis 15 ans maintenant, j’apprends qu’elle a une formation d’art thérapeute, que son crédo c’est le respect du vivant, ATTENTION toute forme de vivant, et son but l’autonomie.

Autodidacte, elle a commencé dans son premier jardin en appliquant à la lettre les idées du livre Le guide du jardin bio de Jean-Paul Thorez aux éditions Terre Vivante.

« J’avais un livre, bah j’ai suivi le livre. »

Oui, ça paraît logique et pourtant nombreux sont ceux qui l’aurait lu, parcouru, feuilleté sans jamais se lancer. Marieke, très bonne élève, a donc commencé son jardin avec pour but d’atteindre l’autonomie et a vu très grand en produisant 150 pieds de tomates, 80 pieds de courges…

J’ai fini par en vendre des voitures entières ! (rire)

C’était il y a quinze ans et aujourd’hui sa serre et son organisation sont à faire pâlir n’importe quel jardinier : tout est à hauteur pour semer, arroser et entretenir ses jeunes plants !

Des choux à repiquer pour cet hiver, des cagettes avec réserve d’eau et, tout à gauche, des plants de tomates qui touchent le plafond de la serre !

Quelques années plus tard Marieke a découvert Emilia Hazelip l’amenant ainsi à expérimenter d’autres techniques que le jardinage bio (intensif) comme : la permaculture, les planches de culture sur laquelle on passe une fois la grelinette pour activer la vie du sol ainsi que maraîchage sur sol vivant.

Puis, dans son jardin actuel, elle a expérimenté les bienfaits de l’enracinement permanent sur les cultures et sur leur productivité avec une production de biomasse sur place (des trognes) car Marieke ne peut enfoncer que la moitié de deux dents d’une grelinette ! Donc elle s’est adaptée à son sol calcaire peu fertile et peu profond.

… À la syntropie

Sa découverte de la syntropie lui a fait l’effet d’une illumination, un « mais oui mais c’est bien sûr ! » lui échappe quand elle m’en parle.

« On crée un film, on ne voit plus le jardin comme un tableau et il y a l’aspect de la perturbation avec le fait de couper et de stimuler le végétal. C’est nouveau et ça marche ! »

Bien sûr c’est nouveau de planter pour couper, pour produire de la biomasse et pour nourrir le sol mais une fois qu’on l’a expérimenté, on « ne peut plus aller au jardin sans sa machette ! »

Pour Marieke, la syntropie rassemble tous les concepts qu’elle a appris jusqu’à présent et va plus loin. Toutes les plantes qu’elles soient potagères, arbres fruitiers ou bien encore arbres de haies champêtres, sont plantées au même endroit et créent un milieu très riche.

« La syntropie c’est l’apothéose ! »

Cependant, Marieke relativise, car il y a encore énormément de chemin à faire dans la découverte des plantes et de comment tout cela peut fonctionner. Il est certain que les recherches continuent et vont évoluer. Marieke sait que plus tard on « en rira de la syntropie ».

Pour aller plus loin :

Consultez le Hub syntropique qui référence les fermes syntropiques.

Marieke et son jardin

Qu’on se rappelle le contexte particulier de cet été 2022 avec ses canicules faisant monter le thermomètre jusqu’à 40°!

Un jardin compliqué

S’ajoute à cela le jardin de Marieke au sol argilo-calcaire, avec une roche affleurant parfois : une terre peu profonde et peu fertile ! On l’a vu, Marieke a déjà eu deux lieux bien différents mais pas toujours évidents, dans lesquels elle a su tirer le meilleur pour tendre vers l’autonomie.

« Là je ne peux même pas planter une grelinette ! Donc je me suis intéressée au maraîchage sur sol vivant pour ne pas travailler le sol et j’ai appris plein de choses ! »

Cultiver l’abondance

Marieke a donné non pas un mais plusieurs buts à son jardin : notamment la culture d’arbres fruitiers et de légumes. Elle a imaginé encercler son jardin d’une haie syntropique afin de pourvoir à ses besoins en fruits et de faire au centre un coin potager.

La haie fruitière

Elle y cultivera à termes – et ils donnent déjà – des petits fruits (groseillers, caseillers et cassissiers) ainsi que des pommiers. Les productions secondaires et de biomasse seront le goji, le sureau, le saule, l’albizia et en strates basses des consoudes et des aromatiques (romarin, sauge, lavande). Toutes ces plantes et toutes ces strates resteront en place quand les pommiers produiront dans le but d’entretenir cette dynamique syntropique (en coupant constamment).

Évolution d’une haie syntropique

Mars, plantation au même moment des arbres fruitier (scions), des aromatiques, des tournesols et des fèves (entre autres).
Un mois plus tard, tout a bien poussé, il va être temps de perturber à nouveau…
… En coupant des tournesols pour nourrir le sol et indiquer aux autres plants qu’il faut produire et pousser. Vous voyez les plants desséchés au sol ?
Les tournesols ont encore bien grandi, d’autres sont coupés.

Le potager

Enfin, bien sûr la majeure partie de ses cultures est dédiée à la production de légumes ! Toutes sortes de légumes avec comme producteurs de biomasse le tournesol, les amaranthes et les tithonias.

Mais comme on l’a dit, la syntropie n’est pas figée, c’est un films et non plus un tableau qui est voué à évoluer, changer, et être adaptés avec le temps. Marieke imagine d’ici à quelques temps développer le verger.

Pour en savoir plus sur le déroulé d’un film syntropique c’est par ici :

Des échecs et des réussites

Marieke on la voit souriante et plutôt ravie de ses cultures qui lui ont déjà donné moultes récoltes qu’elle a transformé en bocaux, confitures diverses, cuir de fruits… Eh oui, elle est pleine de ressource. Alors quand je lui demande quels sont ses échecs cette année, elle réfléchit un instant avant de se rappeler que les pastèques et les melons n’ont pas du tout fonctionné en compagnie du tournesol (qui est une plante allélopathique : elle dégage une substance qui empêche les autres plantes de pousser à côté). Quand je lui fais part de cette remarque elle m’intime que ça n’a pas vraiment dérangé les autres plantes, au contraire !

Finalement ce projet pour cette année était globalement réussi en particulier les tournesols et les tomates dans une énorme densité qui ont été extrêmement productifs cette année malgré la canicule et le manque d’eau.

Des projets futurs

Marieke garde l’envie d’ouvrir une micro pépinière de vivaces qu’elle vendrait l’hiver et/ou d’un jardin qui serait artistique (beau et nourricier).

Elle sait que dans un futur très proche, elle ne restera pas dans ce jardin et devra trouver un nouveau lieu moins grand qu’ici. Mais elle a tellement cherché de lieux dans sa vie qu’elle attend cette fois-ci qu’il la trouve !

La syntropie une réponse au changement climatique ?

Évidemment au niveau de l’arrosage et de l’adaptation au sol compliqué à cultivé, la syntropie semble offrir une belle alternative agricole face au manque d’eau.

Un jardin qui souffre de la chaleur mais qui n’est pas arrosé depuis trois semaine !

L’eau et les microclimats

En marchant dans son jardin, je découvre des tomates cultivées en solitaire et des tomates cultivées parmi tant d’autres choses. Les premières ont les feuilles toutes recroquevillées et n’ont quasiment rien donné. Les autres profitent du couvert végétal des plantes autour et sont très productives. Un vrai microclimat sans pareil.

Des tomates qui ont moins souffert de la chaleur d’être ainsi entourées !

Depuis avril Marieke n’a arrosé que 15 fois !

Elle cultive l’eau en :

  • paillant avec du ligneux (les résidus des arbres, plantes taillées) ce qui crée une trame d’hyper fluidité en augmentant le taux d’humus (donc en renforçant l’éponge du sol).
  • favorisant la photosynthèse en plantant densément. La photosynthèse crée de l’eau nouvelle : les plantes transpirent et rejettent l’eau qui est immédiatement réutilisée dans le système. Conclusion : il faut planter.
  • perturbant : par la coupe et la taille massive et en laissant les racines dans le sol qui, elles aussi, rejettent de l’eau.

En résumé : pour cultiver l’eau il faut que ça pousse et pour que ça pousse il faut tailler. Ainsi le taux d’humus et les mycorhizes croissent à la seule condition que ce soit densément planté et vert. C’est un cercle vertueux qui entretient le microclimat.

À voir ainsi de jeunes arbres au beau milieu des légumes, je me questionne sur la concurrence en eau. Les arbres ne leur pompent-ils pas l’eau ?

Bien sûr que si, ils pompent l’eau ! Mais implantés en syntropie, ils sont d’abord petits (donc ce n’est pas encore un problème pour les légumes) puis ils grandissent dans une dynamique différente qui élimine cette concurrence inter racinaire.

Pour aller plus loin :

Grandeur des plantes

Je me suis renseignée sur la syntropie et il paraîtrait que les plantes doublent de taille en étant cultivées en syntropie. Qu’en est-il ? Marieke ne l’a pas expérimenté elle-même en faisant deux parcelles distinctes : une cultivée en syntropie et une autre sans la pression de la machette afin de constater la différence. Elle a en revanche connaissance de fermes en syntropie qui lui disent que les plantes auraient 20 cm de différence après une seule perturbation (taille).

Elle ne peut pour l’instant que constater une très belle pousse des végétaux qu’elle a planté (qui, pour certains, étaient vraiment très petits).

Les conseils de la fin pour se lancer dans la syntropie

On ne va pas partir ainsi, sans avoir au préalable des petits conseils pour celles et ceux qui souhaiteraient se lancer ! Je suis sûre que la syntropie vous a intéressé et que vous aimeriez bien la reproduire chez vous !

Marieke nous conseille :

  • de ne surtout pas avoir peur de trop planter ;
  • de ne pas craindre de tailler. Cela reste la base de la culture en syntropie ;
  • d’apprendre au fil des saisons l’espace nécessaire à l’épanouissement de chaque plante.

Parfois on plantera trop serré, ou trop large par rapport à l’étagement des cultures. C’est seulement en expérimentant qu’on saura à quelle distance nos végétaux ont assez d’espace pour produire.

Et enfin elle nous enjoint :

  • de concevoir notre jardin en 3D et non plus en 2D.

À ce propos vous pouvez (re)lire cet article qui traite de la manière de gagner de la place au potager illustré par ma sœur :

Visiter des jardins inspirants et écologiquement viables redonne espoir pour la planète. Et si le jardinage syntropique était l’avenir pour nous jardinier amateur ?

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